La fast-déco est-elle la nouvelle fast-fashion ?

Depuis plusieurs années maintenant, le mot « fast-fashion » est dans tous les esprits. Il faut si possible éviter de consommer des vêtements bas de gamme et très tendances, fuir certains magasins, résister à la tentation, tant bien que mal. Mais il y a un autre mouvement qui est lui passé un peu inaperçu à côté : celui de la fast-déco. On vous explique tout ça.

La fast deco : bougies torsadées colorées de chez Sostrene grene

C’est quoi la fast-déco ?

Pour commencer, il faut évidemment expliquer ce qu’est la fast-déco. Et pour cela, rien de mieux que de regarder la définition de la fast-fashion.

L’organisation Oxfam écrit à ce sujet :

« La fast fashion désigne une tendance (…) reposant sur un renouvellement ultra-rapide des collections. S’appuyant sur un rythme de production effréné, certaines enseignes vont jusqu’à renouveler leurs collections toutes les deux semaines,voire moins. Cette mode « jetable » produite à moindre coût a des conséquences sociales et environnementales désastreuses. »

 

Par extension, la décoration « fast » est une décoration qui se renouvelle sans cesse, avec des collections de plus en plus rapprochées dans le temps.

Pour caricaturer, ce sont ces boutiques dans lesquelles on peut trouver la toute dernière tendance à très petit prix, deux semaines après son apparition, dans une matière souvent un peu bas de gamme, un peu cheap.

H&M Home, Pimkie Home, Mango Home, Zara Home… la fast-fashion se met à la déco

Depuis le début des années 2000, certaines enseignes ont fleuré le bon filon. Zara en premier, a lancé sa gamme « Home » en 2006, avec des objets de décoration et petit mobilier.

Ont suivi Pimkie avec Pimkie Home, H&M avec H&M Home ou encore Mango avec… Mango Home.

A côté, on trouve des enseignes plus spécialisées. Il y a bien sûr le géant Maisons du Monde, mais aussi Hema, Flying Tiger, Sostrene Grene ou plus récemment, Sklum et même Shein…

 

Lorsqu’on s’intéresse en détails aux collections de ces entreprises, il n’est pas dur de voir à quel point elles suivent les tendances. Prenons l’exemple de Pimkie Home.

En 2016, pour sa première, Pimkie propose une collection axée autour du voyage. Des motifs berbères et graphiques, des matériaux dorés ou cuivrés. La plupart de ces pièces semblent aujourd’hui « démodées », « dépassées » – ce qui ne veut pas dire que vous n’avez pas le droit de les adorer.

A droite, on voit quelques pièces de leur dernière collection datée de la rentrée 2022. Cette fois, changement de ton : des couleurs vives, du damier, des imprimés animaliers et du néon. Des pièces tendances – encore une fois, qu’on les aime ou non, là n’est pas le sujet.

Le problème avec la fast-déco ou le fast-design

La fast-déco est un sujet que l’on aborde beaucoup moins souvent que la fast-fashion, malgré l’essor économique considérable de ce marché ces dernières années.

Il pose cependant des problèmes similaires au niveau écologique, au niveau de la gestion des déchets notamment.

Aux Etats-Unis, ce sont pas moins de 12 millions de tonnes de meubles et accessoires de maison qui sont jetés chaque année. En France, on en compte 1,3 million de tonnes.

« La quantité de déchets d’éléments d’ameublement a beaucoup augmenté ces trente dernières années, du fait de changements d’habitude de vie et de consommation, mais aussi de la durée de vie limitée des produits bon marché », écrivait à ce sujet le Ministère de la Transition écologique.

Décoration et écologie : quand la fast-déco génère des déchets

Ces déchets sont d’autant plus problématiques que la plupart du temps, ce sont des fibres synthétiques qui sont utilisées pour les productions d’objets en masse. Ces matériaux nécessitent non seulement beaucoup d’eau et d’énergie pour être produits, mais ils sont aussi difficiles à recycler.

Les meubles bon marché par exemple sont construits en panneaux de particules (un mélange de copeaux de bois, sciures et autres particules) et de colle contenant souvent du formaldéhyde, un agent cancérigène. Leur recyclage est complexe et coûteux. Il est souvent moins cher, et donc préférable pour bien des entreprises, de les incinérer ou les mettre en décharges. Cela vaut pour bon nombre de matériaux synthétiques.

A ceci s’ajoute le coût écologique du transport. Plus les objets viennent de loin, où la main d’oeuvre est moins chère, plus l’empreinte carbone explose.

Pourquoi la fast-déco nous pousse à surconsommer

Ces problèmes sont d’autant plus importants que la fast-déco, par essence, nous pousse à la sur-consommation.

Si vous avez l’habitude de faire des achats impulsifs pour votre intérieur et que vous vous en lassez deux ou six mois plus tard au point parfois de changer toute votre décoration d’un coup, vous le saviez probablement déjà…

La surconsommation est un pendant assez logique du phénomène du fast-design. Les petits prix combinés à l’aspect tendance et l’envie de rester à la page ne jouent pas en votre faveur.

Dans la sociologie de la consommation, on estime que les objets ne sont pas forcément achetés par utilité matérielle ou économique. C’est aussi parce qu’ils sont un marqueur social.

De la même façon que les livres qui sont dans votre intérieur jouent un rôle et agissent sur la perception que les autres ont de vous, les objets de décoration sont porteurs de sens.

Lire aussi : Les livres sont-ils un objet de déco comme les autres ?

Ils disent quelque chose de vous. Cela peut être un moyen de souligner sa richesse, ou sa culture, ou son importance sociale, ses goûts, etc. C’est d’ailleurs pour cela que certains objets se vendent sans même être mentionnés dans la publicité : ce n’est pas le matériel qui compte, mais le message véhiculé derrière, le symbole…